Chlordécone dans le sang : moins d’un 1% des guadeloupéens s’est fait testé

Depuis plusieurs mois, il est possible de connaître son taux d’exposition au chlordécone. Une simple prise sang, gratuite. Pour autant, seuls 1 252 prélèvements ont été réalisés, sur les 385 000 habitants vivant en Guadeloupe.

“Chlordéconé” ou pas “chlordéconé”, telle est la question que se posent des centaines de milliers d’antillais. Pour y répondre, depuis le mois de mai, chaque citoyen peut se faire tester, gratuitement, dans un laboratoire d’analyse, il suffit d’être muni d’une prescription médicale.

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Si depuis des mois, l’examen est accessible à tous, les chiffres révèlent un manque d’engouement au sein de la population. Sur 385 000 habitants, seuls, “1 252 prélèvements de chlordéconémie ont été réalisés”, indique Caroline Corlier, chargée de mission de l’Agence régionale de santé qui compile les résultats. Pour autant, la chlordécone est soupçonnée d’être à l’origine de nombreuses maladies, dont le cancer de la prostate. 

Le pesticide serait présent dans le corps de plus de 90% des Antillais.

Résultat de l’étude Kannari menée entre 2011 et 2018 par Santé publique France

L’agence régionale de santé (ARS), révèle que la moitié de la population guadeloupéenne est exposée à moins de 0,06 microgramme par litre de sang. L’autre moitié, est au-delà.

La valeur toxique de référence (VTR-dose à partir de laquelle le risque de maladie s’accroît, NDLR), est fixée à 0,4 microgramme par litre de sang: 15% des Guadeloupéens sont concernés, et souvent originaires du croissant bananier.

Caroline Corlier, chargée de mission de l’Agence régionale de santé qui compile les résultats

Dès qu’une personne testée, dépasse la valeur toxique de référence, elle intègre un parcours de prise en charge.

Il y a un premier bilan à domicile, pour évaluer les modes de vie et de consommations alimentaires, puis des ateliers collectifs pour travailler sur les modes alimentaires. D’autres ateliers pour apprendre à cultiver hors-sol par exemple, peuvent-être envisagés.

Caroline Corlier, chargée de mission de l’Agence régionale de santé qui compile les résultats

Et pour cause, il serait possible d’éliminer naturellement son exposition à la chlordécone. Mme Corlier, indique que des tests sont proposés aux personnes contaminés, à 9 puis 18 mois, pour noter l’évolution et voir l’impact du programme de l’ARS après quelques temps. 

Nombreux sont les guadeloupéens qui cultivent leur jardin pour leur consommation personnelle. Depuis 2009, ceux qui le souhaitent ont également “la possibilité de faire tester leur parcelle” gratuitement, explique Guillaume Pompougnac, chef du projet Jafa pour jardins familiaux. Des équipes viennent à leur domicile prélever des carottes de terre qui sont par la suite analysées pour connaître le taux de chlordécone qu’elles contiennent. Si la terre est contaminée il faut éviter de planter des légumes racines comme l’igname. Ces données ont permis d’établir une cartographie: “les terres les plus polluées sont celles qui ont servi à la culture de la banane depuis les années 1970. Mais il n’est pas impossible, loin de là, que le pesticide ait été utilisé sur d’autres cultures”, selon le programme Jafa.

Par ailleurs, la chlordécone fait toujours l’objet de nombreuses recherches. A l’université des Antilles, une étude sur du charbon actif à base de sargasses avait donné des résultats positifs en matière de dépollution des sols notamment. Une autre, lancée par l’Anses, s’intéresse aux modes de cuisson sur des aliments contaminés (racines, poissons, etc…), dans le but de mesurer l’incidence.